Quand un film vous donne l'irrésistible envie d'aller lire un recueil de contes

Sorti en salles à l'occasion du Festival de Cannes en mai dernier, Tale of Tales, Le Conte des Contes est signé du réalisateur italien Matteo Garrone, connu pour son film Gomorra et son goût pour la violence et les tréfonds de l'âme humaine.

Tale of Tales est une adaptation très libre du recueil de contes du napolitain Giambattista Basile (1570 – 1632) Lo Cunto de li Cunti (Le conte des contes ou le divertissement des petits enfants) aussi connu sous le titre de Pentaméron. Les textes de Basile ont fait l'objet d'une publication posthume entre 1634 et 1636 par sa sœur Adriana Basile, célèbre cantatrice. Ce premier recueil de « contes de fées », précurseur de ceux de Charles Perrault et des frères Grimm, regroupe cinquante contes parmi lesquels Garrone en a retenu trois : Le cœur fécondant (La cerva fatata) dans lequel une reine est prête à tout pour enfanter, La vieille écorchée (La vecchia scortecata) où le sort de deux vieilles femmes, harcelées par un roi dévoyé, bascule entre le comique et le tragique et La puce (Lo Polece) dans lequel un roi s'éprend d'une puce qu'il dorlote jusqu'au dernier souffle de l'animal et qui, négligeant sa fille, l'offre en mariage à un ogre sanguinaire, seul prétendant à même de résoudre l'énigme, à savoir trouver à quel animal une peau, celle de la défunte puce, appartient. Les contes choisis par Garrone mettent en scène des souverains décadents qui ont perdu tout sens de la réalité et trois générations de femme torturées par leur obsession de beauté, jeunesse, mariage et enfant.

Les prises de vue prennent le temps de nous baigner dans un univers onirique où la morale explicite n'est pas nécessaire puisque l'enchaînement des destins et la mise en scène subliment la matière du conte. Du sang, de la chair, un ogre, de la magie, des sorciers, de beaux châteaux (dont la forteresse de Castel del Monte dans les Pouilles en Italie), des reines, des princesses, des animaux fantastiques et pour finir un feu d'artifice d'images parfois sanglantes mais aussi efficaces à l'écran que les explosions de variations synonymiques et hyperboliques des textes de Basile.

Tale of tales donne très envie d'aller découvrir les contes de Basile dans lesquels on retrouve cette polarité de la civilité et de la sauvagerie, de la nature et de la culture propre aux contes du napolitain. Les désirs et la démesure des êtres humains sont nettement exploités dans le film de Matteo Garrone qui n'est certes pas une rêverie légère et s'adresse tout d'abord aux adultes, mais dont on saisit l'occasion pour s'enrichir des textes de Basile qui eux sont dédiés aux enfants tels La Chatte Cendrillonne, Visage, Les deux Galettes que l'on retrouve au rayon littérature pour la jeunesse.

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